— Parce que, par les règlements de la prison, il n’est point permis à un prisonnier de le demander.
— Qu’y a-t-il donc de permis ici ? demanda Dantès.
— Une meilleure nourriture en payant, la promenade, et quelquefois des livres.
— Je n’ai pas besoin de livres, je n’ai aucune envie de me promener et je trouve ma nourriture bonne ; ainsi je ne veux qu’une chose, voir le gouverneur.
— Si vous m’ennuyez à me répéter toujours la même chose, dit le geôlier, je ne vous apporterai plus à manger.
— Eh bien ! dit Dantès, si tu ne m’apportes plus à manger, je mourrai de faim, voilà tout.
L’accent avec lequel Dantès prononça ces mots prouva au geôlier que son prisonnier serait heureux de mourir ; aussi, comme tout prisonnier, de compte fait, rapporte dix sous à peu près par jour à son geôlier, celui de Dantès envisagea le déficit qui résulterait pour lui de sa mort, et reprit d’un ton plus adouci :
— Écoutez : ce que vous désirez là est impossible ; ne le demandez donc pas davantage, car il est sans exemple que, sur sa demande, le gouverneur soit venu dans la chambre d’un prisonnier ; seulement, soyez bien sage, on vous permettra la promenade, et il est possible qu’un jour, pendant que vous vous promènerez, le gouverneur passe : alors vous l’interrogerez, et, s’il veut vous répondre, cela le regarde.
— Mais, dit Dantès, combien de temps puis-je attendre ainsi sans que ce hasard se présente ?
— Ah ! dame ! dit le geôlier, un mois, trois mois, six mois, un an peut-être.
— C’est trop long, dit Dantès, je veux le voir tout de suite.
— Ah ! dit le geôlier, ne vous absorbez pas ainsi dans