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15 centimes le Numéro
7 Mai 1859
No 22

LE CAUCASE
JOURNAL DE VOYAGES ET ROMANS
PARAISSANT TOUS LES JOURS

Nous commençons notre publication par le voyage d’ALEXANDRE DUMAS au Caucase.
Cette première publication de notre Journal, entièrement inédite, sera complète en trente numéros pour lesquels on s’abonne chez Jaccottet, rue Lepelletier, 31, et pour la vente, chez Delavier, rue Notre-Dame-des-Victoires, 11.

Les cris Giaour ! giaour ! retentirent aussitôt et prenaient déjà une expression menaçante, lorsque les naïbs parvinrent à faire comprendre aux habitants que la mission du docteur était toute pacifique.

On arriva à la maison où l’on devait passer la nuit ; le maître de cette maison vint au-devant du docteur, et après avoir causé avec les naïbs, fit signe à M. Piotrowsky de le suivre.

Il le conduisit dans une chambre, lui indiqua un coin en lui disant assez brutalement : — Assieds-toi là ; puis il sortit fermant la porte et emportant la clef.

Dans cette chambre se trouvait déjà, au grand étonnement du docteur, une femme avec un enfant de quatre ans. Le feu devant lequel cette femme était assise permettait au docteur de voir qu’elle était jeune et jolie.

Le docteur resta à peu près une heure avec cette femme ; mais, soit qu’elle n’entendît pas le russe, soit qu’il lui eût été ordonné de rester muette, elle ne répondit à aucune des questions du docteur.

Enfin, le maître de la maison rentra accompagné d’un des naïbs. Ils firent signe au docteur de les suivre. On eût dit que ces hommes ne parlaient que lorsqu’ils ne pouvaient absolument pas faire autrement que de parler.

Après avoir traversé la cour, le docteur entra dans une autre chambre qui n’était point éclairée. Son hôte referma la porte derrière eux, puis, s’approchant de la cheminée, où le bois était préparé d’avance, il alluma le feu. — À la lueur qu’il répandit autour de lui, le docteur reconnut qu’il était dans l’appartement où les Orientaux reçoivent leurs visites.

Le feu éclairait un lit où le docteur, écrasé de fatigue, se coucha et s’endormit à l’instant.

En s’éveillant, le matin, il vit un de ses naïbs qui causait avec un autre naïb qui lui était inconnu. Ce dernier avait deux