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place où il était, et tout en ayant l’air de grignoter son pain sec. Sa tête seule tourna, cinq minutes à peu près, comme celle d’un magot de la Chine, et cela infructueusement, lorsque tout à coup un objet quelconque lui tomba sur la tête et s’arrêta dans ses cheveux. Le capitaine porta la main à l’endroit percuté et trouva la pelure de sa goyave. Le capitaine Pamphile leva le nez et aperçut, directement au-dessus de lui, un singe qui grimaçait dans les branches d’un arbre.

» Le capitaine Pamphile étendit la main vers son fusil, sans perdre de vue son larron ; puis, appuyant la crosse à son épaule, il lâcha le coup. La guenon tomba à côté de lui.

» — Pécaïre ! dit le capitaine Pamphile en jetant les yeux sur sa nouvelle proie, j’ai tué un singe bicéphale.

» En effet, l’animal gisant aux pieds du capitaine Pamphile avait deux têtes bien séparées, bien distinctes, et le phénomène était d’autant plus remarquable, que l’une des deux têtes était morte et avait les yeux fermés, tandis que l’autre était vivante et avait les yeux ouverts.

» Le capitaine Pamphile, qui voulait éclaircir ce point bizarre d’histoire naturelle, prit le monstre par la queue et l’examina avec attention ; mais, à sa première inspection, tout étonnement disparut. Le singe était une guenon, et la seconde tête celle de son petit, qu’elle portait sur son dos au moment où elle avait reçu le coup, et qui était tombé de sa chute sans lâcher le sein maternel.

» Le capitaine Pamphile, à qui le dévouement de Cléobis et de Biton n’aurait pas fait verser une larme, prit le petit