Page:Dumas - Le Capitaine Pamphile, 1875.djvu/225

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tr’ouvrit la porte, et remit à Georges, qui était de planton dans la salle à manger, une lettre adressée par le capitaine Malvilain à son lieutenant : cette lettre contenait l’ordre de faire passer à bord de la Roxelane douze des cinquante pipes d’eau-de-vie enregistrées à bord du Zéphir, sous la raison Ignace-Nicolas Pelonge et compagnie. C’était juste deux mille bouteilles de plus que le capitaine Pamphile n’en avait strictement besoin ; mais, en homme de précaution, le digne marin avait pensé au déchet qu’une navigation de deux mois pouvait apporter à sa cargaison ; d’ailleurs, il pouvait tout prendre, et, en songeant à part lui à cette omnipotence dont son hôte usait si sobrement, le capitaine Malvilain rendit grâce à Notre-Dame de Guerrande de ce qu’il en était quitte à si bon marché.

Au bout de deux heures, le transport était achevé, et le capitaine Pamphile, fidèle à son système de civilité, avait eu la politesse de faire exécuter son emménagement pendant le dîner, de manière à ce que son collègue ne vît rien de ce qui se passait. On en était aux confitures et aux raisins secs, lorsque Double-Bouche, qui s’était surpassé dans l’exécution du repas, vint dire un mot à l’oreille du capitaine : celui-ci fit de la tête un signe de satisfaction et demanda le café. On le lui apporta aussitôt, accompagné de deux bouteilles d’eau-de-vie, que le capitaine reconnut, au premier petit verre, pour être la même qu’il avait dégustée chez le préfet d’Orléans ; cela lui donna une haute idée de la probité du citoyen Ignace-Nicolas Pelonge, qui faisait ses envois si fidèles aux échantillons.