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vresse naissante, vers le but qu’il se proposait ; il avait parcouru déjà les deux tiers, à peu près, de l’espace qui séparait son point de départ de la bouteille, lorsque, sur la route, il rencontra sa queue.

Ce spectacle le tira momentanément de sa préoccupation. Il s’arrêta devant elle pour la regarder, agita le bout de fouet qui lui restait ; et, après quelques secondes d’immobilité, il en fit le tour pour l’examiner plus en détail ; puis, l’examen fini, il la ramassa négligemment, la tourna et retourna entre ses mains comme une chose qui lui inspirait une assez médiocre curiosité, la flaira une dernière fois, y goûta du bout des dents, et, la trouvant d’un goût assez insipide, il la laissa tomber avec un profond dédain, et reprit sa route vers la bouteille.

C’est le plus beau trait d’ivrognerie que j’aie vu faire de ma vie, et je le livre à l’admiration des amateurs.

Jamais, depuis, Jacques ne reparla de sa queue ; mais il ne se passa point un jour qu’il ne demandât sa bouteille. De sorte qu’aujourd’hui, ce dernier héros de notre histoire est non-seulement affaibli par l’âge, mais encore abruti par la boisson.