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notre sortie momentanée pour jouer aux billes, à leur mettre à chacun un peau de lion sur les épaules, et à les faire entrer dans l’atelier à quatre pattes et vêtus en Hercules Néméens.

Déjà, depuis que la porte de la chambre à coucher était ouverte et que l’odeur des lions pénétrait plus forte et plus directe jusqu’à lui, l’inquiétude de Jacques avait sensiblement augmenté : il s’était élancé sur une échelle double, et, monté sur le dernier échelon, tournait la tête de notre côté, aspirant l’air et poussant de petits cris d’effroi, indiquant qu’il sentait le péril s’approcher et qu’il devinait de quel côté il devait venir.

En effet, au bout d’un instant, un des rapins, suffisamment caparaçonné, se mit à quatre pattes et marcha vers l’atelier, immédiatement suivi de son camarade ; l’agitation de Jacques fut à son comble. Enfin il vit apparaître à la porte la tête du premier lion, et cette agitation devint de la terreur ; mais une terreur insensée, sans calcul, sans espérance ; cette terreur de l’oiseau qui se débat sous le regard du serpent ; cette terreur qui brise les forces physiques, paralyse les facultés morales ; cette terreur du vertige, qui fait qu’aux yeux effrayés le ciel tourne et la terre vacille, et que, toutes les forces s’anéantissant à la fois, on tombe haletant comme dans un songe, sans jeter un seul cri ; voilà ce qu’avait produit le seul aspect des lions.

Ils firent un pas vers Jacques, Jacques tomba de son échelle.

Nous courûmes à lui, il était évanoui ; nous le rele-