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elle avait fait jusqu’alors, plia sur elle-même comme une colonne qui faiblit, et, se dirigeant de notre côté, nous enveloppa de ses tourbillons avant que nous eussions eu le temps de les éviter ; en même temps la pluie de lave et de pierres, cédant à la même influence, tomba tout autour de nous : nous risquions d’être à la fois étouffés par la fumée, et tués ou brûlés par les projectiles. Nous fîmes donc une retraite précipitée vers un autre plateau, moins élevé d’une centaine de pieds et plus rapproché du volcan, à l’exception de Pietro, qui resta un moment en arrière, alluma sa pipe à un morceau de lave, et, après cette fanfaronnade toute française, vint nous rejoindre tranquillement.

Quant à Milord, il fallut le retenir par la peau du cou, attendu qu’il voulait se jeter sur cette lave ardente, comme il avait l’habitude de le faire sur les fusées, les marrons et autres pièces d’artifice.

Notre retraite opérée, nous nous trouvâmes mieux encore dans cette seconde position que dans la première : nous étions rapprochés de l’orifice du cratère, qui n’était plus distant de nous que d’une vingtaine de pas et que nous dominions de cinquante pieds à peine. D’où nous étions parvenus, nous pouvions distinguer plus facilement encore le travail incessant de cette grande machine, et voir la flamme en sortir presque incessamment. La nuit, ce spectacle doit être quelque chose de splendide.

Il était plus de deux heures quand nous songeâmes à partir ; il est vrai que nos gens nous avaient dit qu’il ne nous faudrait pas plus de trois quarts d’heure pour regagner le village. J’avoue que je n’étais pas sans inquiétude sur la façon dont s’exécuterait cette course si rapide ; je sais que presque toujours on descend plus vite qu’on ne monte, mais je sais aussi, et par expérience, que presque toujours la descente est plus dangereuse que la montée. Or, à moins que de rencontrer sur notre chemin des passages tout à fait impraticables, je ne comprenais rien de pire que ce que nous avions vu en venant.

Nous fûmes bientôt tirés, d’embarras. Après un quart d’heure de marche sous un soleil dévorant, nous arrivâmes à cette grande nappe de cendres que nous avions déjà traver-