Page:Dumas - Le Capitaine Aréna.djvu/284

Cette page n’a pas encore été corrigée

tre, n’avaient éprouvé qu’une légère secousse, tandis que, comme on l’a vu, Cosenza, située à moitié chemin de ces deux volcans, était à peu près ruinée.

Nous n’eûmes pas besoin de redescendre jusqu’à Amalfi pour trouver un guide : deux jeunes pâtres gardaient quelques chèvres au pied d’une église voisine du fort romain, l’un d’eux mit son petit troupeau sous la garde de l’autre, et, sans vouloir faire de prix, s’en rapportant à la générosité de Nos Excellences, se mit à trotter devant nous sur le chemin présumé de la Cava ; je dis présumé, car aucune trace n’existait d’abord d’une communication quelconque entre les deux pays ; enfin nous arrivâmes à un endroit où une espèce de sentier commençait à se dessiner imperceptiblement ; cette apparence de route était le chemin ; deux heures après nous étions dans la ville bien-aimée de Filangieri, qui y composa en grande partie son célèbre traité de la Science de la législation.

En récompense de sa peine, notre guide reçut la somme de cinq carlins ; à sa joie nous nous aperçûmes que notre générosité dépassait de beaucoup ses espérances : il nous avoua même que, de sa vie, il ne s’était vu possesseur d’une pareille somme ; et peu s’en fallut que la tête ne lui tournât comme à son compatriote Masaniello.

Le même soir nous fîmes prix avec le propriétaire d’un calessino, qui, moyennant une piastre, devait nous conduire le lendemain à Naples. Comme il y a une douzaine de lieues de la Cava a la capitale du royaume des Deux-Siciles, une des conditions du traité fut qu’a moitié chemin, c’est-à-dire à Torre dell’Annunziata , nous trouverions un cheval frais pour achever la route. Notre cocher nous jura ses grands dieux qu’il possédait justement à cet endroit une écurie où nous trouverions dix chevaux pour un, et, moyennant cette assurance, nous reçûmes ses arrhes.

Je ne sais pas si j’ai dit qu’en Italie, tout au contraire de la France, ce ne sont point les voyageurs mais les voituriers qui donnent des arrhes ; sans cela, soit caprice, soit paresse, soit marché meilleur qu’ils pourraient rencontrer, on ne serait jamais sûr qu’ils partissent.