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imperceptible, souvent même impossible à voir, et qui en occupait ordinairement le centre. Quant à la nature même des eaux en question, jaillies tout à coup du sein de la terre, la vérité se cache dans la foule des conjectures et des différens rapports : les uns prétendent que des eaux bouillantes jaillirent du milieu de ses crevasses, et citent plusieurs habitans qui portent encore les marques des brûlures qu’elles leur ont faites ; d’autres nient que cela soit vrai, et soutiennent que les eaux étaient froides au contraire et tellement imprégnées d’une odeur sulfureuse, que l’air même en fut longtemps infecté ; enfin, quelques-uns démentent l’une et l’autre assertion, et ne voient dans ces eaux que des eaux ordinaires de rivière et de source. Au reste, ces différens rapports peuvent être également vrais, eu égard aux lieux où ces différentes observations furent faites, puisque le sol de la Calabre renferme effectivement ces trois différentes espèces d’eaux.

» La ville de Rosarno fut entièrement détruite ; la rivière qui la traversait présenta un phénomène remarquable. Au moment de la secousse qui renversa la ville, cette rivière, fort grosse et fort rapide en hiver, suspendit tout à coup son cours.

» La route qui allait de cette même ville à San-Fici s’enfonça sous elle même et devint un précipice affreux. Les rocs les plus escarpés ne résistèrent point au bouleversement de la nature ; ceux qui ne furent pas entièrement renversés sont encore tailladés en tous sens et couverts de larges fissures comme s’ils eussent été coupés à dessein avec un instrument tranchant ; quelques-uns sont pour ainsi dire découpés à jour depuis leur base jusqu’à leur cime, et présentent à l’œil étonné comme autant d’espèces de ruelles qui seraient creusées par l’art dans l’épaisseur de la montagne.

» À Polystène, deux femmes étaient dans la même chambre au moment où la maison s’affaissa : ces deux femmes étaient mères ; l’une avait auprès d’elle un enfant de trois ans, l’autre allaitait encore le sien.

» Longtemps après, c’est-à-dire quand la consternation et la ruine générale permirent de fouiller dans les décombres, les cadavres de ces deux femmes furent trouvés dans une