Page:Dumas - Leçons sur la philosophie chimique, 1878.djvu/152

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
148
PHILOSOPHIE CHIMIQUE.

marquer par une de ces actions où se décèle un caractère ferme et décidé qui ne recule devant aucune difficulté. Après quelques expériences, il s’aperçoit que sa vue manque de la délicatesse nécessaire pour apprécier les intensités relatives des diverses flammes qu’il voulait comparer. En conséquence, il fait tendre une chambre de noir, et s’y enferme pendant six semaines dans une obscurité parfaite. Au bout de ce temps, sa vue avait acquis une sensibilité extrême, et les moindres différences ne lui échappaient plus. Mais quel dévouement à la Science ne faut-il pas pour se condamner, à vingt-deux ans, à une réclusion aussi longue et aussi sévère ! Ce dévouement fut récompensé ; car l’Académie lui décerna une médaille d’or en 1776, à cette occasion.

Son esprit calme et ferme s’était déjà fait connaître dans une autre circonstance. La position honorable de sa famille l’obligeait à quelques devoirs sociaux ; mais le monde le distrait, le fatigue, et il cesse d’aller dans le monde. Bientôt cependant le défaut d’exercice, un travail trop soutenu, altèrent ses digestions ; peu à peu il réduit sa nourriture. Enfin, pendant plusieurs mois, il ne prend que du lait pour tout aliment, ne reculant, comme on voit, devant aucun sacrifice, pourvu que les recherches qui préoccupent sa pensée puissent suivre leur cours sans interruption.