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iii

L’ARNO.

En sortant du palais Pitti, on entre dans la vieille ville par trois ponts au choix : le Ponte Vecchio, qui conduit à la place de la Seigneurie ; le Ponte della Trinita, qui conduit à la place du même nom, et le Ponte alla Caraja, qui conduit à la place de Sainte-Marie-Nouvelle.

À propos de ponts, comme je dois une réparation à l’Arno, le lecteur trouvera bon que je la lui fasse à cet endroit.

J’ai écrit je ne sais où que l’Arno était, après le Var, le plus grand fleuve sans eau que je connusse. Le Var n’a rien dit, peu habitué à se trouver dans les rimes des poëtes, peut-être même s’est-il regardé comme honoré de la comparaison, mais il n’en a pas été de même de l’Arno. L’Arno, en se faisant aristocrate, est devenu susceptible. L’Arno s’est regardé comme insulté, je ne dirai pas dans son eau, mais dans son honneur. L’Arno a réclamé, non point par la voie des journaux comme il aurait fait en France : il n’y a heureusement pas de journaux dans la Toscane ; mais par la voix de ses concitoyens.

Une des choses remarquables de l’Italie, c’est la nationalité. Je ne veux pas dire ici cette nationalité qui unit les hommes de ce grand lien politique, civil et religieux, qui fait les États puissans et les peuples forts ; mais de cette nationalité restreinte, individuelle, égoïste, qui remonte au temps des petites républiques. Or il ne faut pas trop dire de mal de cette nationalité, si mal entendue qu’elle paraisse au premier abord : c’est à elle que l’Italie doit la moitié de ses monumens et les trois quarts de ses chefs-d’œuvre.

Mais aujourd’hui que dans l’Italie, comme dans tous les autres pays du monde, on n’élève que peu de monumens, et l’on n’exécute que peu de chefs-d’œuvre, cette nationalité tourne ses dents et ses griffes contre ce qui vient de l’étran-