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quatre millions ; le saint Cattino, rayé avec un diamant, a été reconnu pour être de l’humble verre. Il est arrivé pis encore à la Vénus de Médicis.

Cochin et Lessing, après un mûr et profond examen, ont déclaré que la tête et les deux bras étaient modernes, que les pieds avaient subi plusieurs fractures, mais que tout le reste était antique, à l’exception de quelques petits morceaux dans le torse et ailleurs.

Gall et Spurzheim ont été plus loin : passant de la forme au fond, de la pensée à la matière, du naturalisme à l’idéalisme, ils ont tâté le crâne de la pauvre déesse, et ont déclaré que, si malheureusement ce crâne était moulé sur nature, la mère des amours ne pouvait être qu’une idiote.

Je ne dirai rien de la restauration. Quand les restaurations sont bonnes, je les aime assez en ce qu’elles me prouvent qu’en tout temps il y a des hommes de génie. L’auteur inconnu du Faune ne me paraît pas le moins du monde déshonoré de ce que Michel-Ange a refait tes bras de sa statue.

Je ne dirai rien de l’opinion de Gall et de Spurzheim sur le médiocre degré d’intelligence dont devait jouir la déesse de la beauté, en supposant que la tête de l’original ait la même conformation que la tête de la copie. Il est probable que Jupiter ne l’avait pas faite dans l’intention qu’elle découvrit le système du monde, comme Copernic, ou qu’elle inventât les paratonnerres, comme Franklin. Jupiter l’avait faite parce qu’il manquait au ciel une déesse de la beauté et sur la terre une mère des amours. Or, si la Vénus de la Tribune est belle, tout est résolu.

Malheureusement, à mon avis, la Vénus de Médicis n’est point belle, du moins de cette beauté qui convient à l’amante de Mars, d’Adonis, d’Anchise, à la déesse d’Amathonte, de Paphos, de Lesbos, de Gnide et de Cythère.

La Vénus de Médicis est une nymphe de ballet mythologique surprise au bain par un berger indiscret, et qui prend une pose d’opéra indiquée par Corali ou Mazillier.

Cela est d’autant plus vrai que la Vénus, qui a l’air de vouloir tout cacher, ne cache absolument rien.

Oh ! que ce n’était point là la Vénus antique, la magicienne qui enlevait la pomme d’or à Junon et à Pallas en laissant