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et leur double regard, lui apportant toute l’expression de leur reconnaissance, se concentra sur la jeune fille.

— Maintenant, dit le grand pensionnaire, reste à savoir si Gryphus voudra bien nous ouvrir cette porte.

— Oh ! non, dit Rosa, il ne voudra pas.

— Eh bien ! alors ?

— Alors, j’ai prévu son refus, et tout à l’heure, tandis qu’il causait par la fenêtre de la geôle avec un pistolier, j’ai pris la clef au trousseau.

— Et tu l’as, cette clé ?

— La voici, monsieur Jean.

— Mon enfant, dit Corneille, je n’ai rien à te donner en échange du service que tu me rends, excepté la Bible que tu trouveras dans ma chambre : c’est le dernier présent d’un honnête homme ; j’espère qu’il te portera bonheur.

— Merci, monsieur Corneille, elle ne me quittera jamais, répondit la jeune fille.

Puis à elle-même et en soupirant :

— Quel malheur que je ne sache pas lire ! dit-elle.

— Voici les clameurs qui redoublent, ma fille, dit Jean ; je crois qu’il n’y a pas un instant à perdre.

— Venez donc, dit la belle Frisonne, et par un couloir intérieur, elle conduisit les deux frères au côté opposé de la prison.

Toujours guidés par Rosa, ils descendirent un escalier d’une douzaine de marches, traversèrent une petite cour aux remparts crénelés, et la porte cintrée s’étant ouverte, ils se retrouvèrent de l’autre côté de la prison dans la rue déserte, en face de la voiture qui les attendait, le marchepied abaissé.