Page:Dumas - La Tulipe noire (1892).djvu/154

Cette page a été validée par deux contributeurs.

Rosa avait dit : À neuf heures, attendez-moi.

La dernière note de bronze vibrait encore dans l’air lorsque Cornélius entendit dans l’escalier le pas léger et la robe onduleuse de la belle Frisonne, et bientôt le grillage de la porte sur laquelle fixait ardemment les yeux Cornélius s’éclaira.

Le guichet venait de s’ouvrir en dehors.

— Me voici, dit Rosa encore tout essoufflée d’avoir gravi l’escalier, me voici !

— Oh ! bonne Rosa !

— Vous êtes content de me voir ?

— Vous me le demandez ! Mais comment avez-vous fait pour venir ? dites !

— Écoutez, mon père s’endort chaque soir presque aussitôt qu’il a soupé ; alors je le couche un peu étourdi par le genièvre ; n’en dites rien à personne, car, grâce à ce sommeil, je pourrai chaque soir venir causer une heure avec vous.

— Oh ! je vous remercie, Rosa, chère Rosa.

Et Cornélius avança, en disant ces mots, son visage si près du guichet que Rosa retira le sien.

— Je vous ai rapporté vos caïeux de tulipe, dit-elle.

Le cœur de Cornélius bondit. Il n’avait point osé demander encore à Rosa ce qu’elle avait fait du précieux trésor qu’il lui avait confié.

— Ah ! vous les avez donc conservés !

— Ne me les aviez-vous pas donnés comme une chose qui vous était chère !

— Oui, mais seulement parce que je vous les avais donnés, il me semble qu’ils étaient à vous.

— Ils étaient à moi après votre mort et vous êtes vivant,