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chose comme vingt-deux ou vingt-trois mille jours de prison.

Van Baerle, tout en pensant à ses trois caïeux, car cette pensée battait toujours au fond de sa mémoire comme bat le cœur au fond de la poitrine, van Baerle, disons-nous, tout en pensant à ses trois caïeux, se fit un piège à pigeons. Il tenta ces volatiles par toutes les ressources de sa cuisine, dix-huit sous de Hollande par jour, — 12 sous de France, — et au bout d’un mois de tentations infructueuses, il prit une femelle.

Il mit deux autres mois à prendre un mâle ; puis il les enferma ensemble, et vers le commencement de l’année 1673, ayant obtenu des œufs, il lâcha la femelle, qui, confiante dans le mâle qui les couvait à sa place, s’en alla toute joyeuse à Dordrecht avec son billet sous son aile.

Elle revint le soir.

Elle avait conservé le billet.

Elle le garda ainsi quinze jours, au grand désappointement d’abord, puis ensuite au grand désespoir de van Baerle.

Le seizième jour enfin elle revint à vide.

Or, van Baerle adressait ce billet à sa nourrice, la vieille Frisonne, et suppliait les âmes charitables qui le trouveraient de le lui faire remettre le plus sûrement et le plus promptement possible.

Dans cette lettre, adressée à sa nourrice, il y avait un petit billet adressé à Rosa.

Dieu qui porte avec son souffle les graines de ravenelles sur les murailles des vieux châteaux et qui les fait fleurir dans un peu de pluie, Dieu permit que la nourrice de van Baerle reçût cette lettre.