— Mais personne ne le sait ?
— Ils sont arrivés incognito. Leur entrée solennelle est remise à après-demain, je crois. Au reste, vous verrez, dit Marguerite avec un petit air satisfait qui n’était point exempt de pédantisme, ce que j’ai fait ce soir est assez cicéronien ; mais laissons là ces futilités. Parlons de ce qui vous est arrivé.
— À moi ?
— Oui.
— Que m’est-il donc arrivé ?
— Ah ! vous avez beau faire le brave, je vous trouve un peu pâle.
— Alors, c’est d’avoir trop dormi ; je m’en accuse bien humblement.
— Allons, allons, ne faisons point le fanfaron, je sais tout.
— Ayez donc la bonté de me mettre au courant, ma perle, car moi je ne sais rien.
— Voyons, répondez-moi franchement. Que vous a demandé la reine mère ?
— La reine mère à moi ! avait-elle donc à me parler ?
— Comment ! vous ne l’avez pas vue ?
— Non.
— Et le roi Charles ?
— Non.
— Et le roi de Navarre ?
— Non.
— Mais le duc d’Alençon, vous l’avez vu ?
— Oui, tout à l’heure, je l’ai rencontré dans le corridor.
— Que vous a-t-il dit ?
— Qu’il avait à me donner quelques ordres entre neuf et dix heures du soir.
— Et pas autre chose ?
— Pas autre chose.
— C’est étrange.
— Mais, enfin, que trouvez-vous d’étrange, dites-moi ?
— Que vous n’ayez entendu parler de rien.
— Que s’est-il donc passé ?
— Il s’est passé que pendant toute cette journée, malheureux, vous avez été suspendu sur un abîme.
— Moi ?
— Oui, vous.
— À quel propos ?