pondit une seconde fois Marguerite en pâlissant malgré elle.
— Bien, bien, dit Catherine d’un air indifférent, on s’informera. Allez, ma fille ; tranquillisez-vous, votre mère veille sur votre honneur.
Marguerite sortit.
— Ah ! murmura Catherine, on se ligue ; Henri et Marguerite s’entendent : pourvu que la femme soit muette, le mari est aveugle. Ah ! vous êtes bien adroits, mes enfants, et vous vous croyez bien forts ; mais votre force est dans votre union, et je vous briserai les uns après les autres. D’ailleurs un jour viendra où Maurevel pourra parler ou écrire, prononcer un nom ou former six lettres, et ce jour-là on saura tout.
Oui, mais d’ici à ce jour-là le coupable sera en sûreté. Ce qu’il y a de mieux, c’est de les désunir tout de suite.
Et en vertu de ce raisonnement, Catherine reprit le chemin des appartements de son fils, qu’elle trouva en conférence avec d’Alençon.
— Ah ! ah ! dit Charles IX en fronçant le sourcil, c’est vous, ma mère !
— Pourquoi n’avez-vous pas dit encore ? Le mot était dans votre pensée, Charles.
— Ce qui est dans ma pensée n’appartient qu’à moi, Madame, dit le roi de ce ton brutal qu’il prenait quelquefois, même pour parler à Catherine. Que me voulez-vous ? dites vite.
— Eh bien ! vous aviez raison, mon fils, dit Catherine à Charles ; et vous, d’Alençon, vous aviez tort.
— En quoi, Madame ? demandèrent les deux princes.
— Ce n’est point M. de La Mole qui était chez le roi de Navarre.
— Ah ! ah ! dit François en pâlissant.
— Et qui était-ce donc ? demanda Charles.
— Nous ne le savons pas encore, mais nous le saurons quand Maurevel pourra parler. Ainsi, laissons là cette affaire qui ne peut tarder à s’éclaircir, et revenons à M. de La Mole.
— Eh bien ! M. de La Mole, que lui voulez-vous, ma mère, puisqu’il n’était pas chez le roi de Navarre ?
— Non, dit Catherine, il n’était pas chez le roi, mais il était chez… la reine.
— Chez la reine ! dit Charles en partant d’un éclat de rire nerveux.