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Charles et sa mère échangèrent un regard.

— En manteau rouge ? dit le roi.

— En manteau rouge, reprit d’Alençon.

— Et ce manteau rouge ne vous a donné soupçon sur personne ?

D’Alençon rappela toute sa force pour mentir le plus naturellement possible.

— Au premier aspect, dit-il, je dois avouer à Votre Majesté que j’avais cru reconnaître le manteau incarnat d’un de mes gentilshommes.

— Et comment nommez-vous ce gentilhomme ?

— M. de La Mole.

— Pourquoi M. de La Mole n’était-il pas près de vous comme son devoir l’exigeait ?

— Je lui avais donné congé, dit le duc.

— C’est bien ; allez, dit Charles.

Le duc d’Alençon s’avança vers la porte qui lui avait donné passage pour entrer.

— Non point par celle-là, dit Charles ; par celle-ci.

Et il lui indiqua celle qui donnait chez sa nourrice. Charles ne voulait pas que François et Henri se rencontrassent.

Il ignorait qu’ils se fussent vus un instant, que cet instant eût suffi pour que les deux beaux-frères convinssent de leurs faits…

Derrière d’Alençon et sur un signe de Charles, Henri entra à son tour.

Henri n’attendit pas que Charles l’interrogeât.

— Sire, dit-il, Votre Majesté a bien fait de m’envoyer chercher, car j’allais descendre pour lui demander justice.

Charles fronça le sourcil.

— Oui, justice, dit Henri. Je commence par remercier Votre Majesté de ce qu’elle m’a pris hier au soir avec elle ; car en me prenant avec elle, je sais maintenant qu’elle m’a sauvé la vie ; mais qu’avais-je fait pour qu’on tentât sur moi un assassinat ?

— Ce n’était point un assassinat, dit vivement Catherine, c’était une arrestation.

— Eh bien ! soit, dit Henri. Quel crime avais-je commis pour être arrêté ? Si je suis coupable, je le suis autant ce matin qu’hier soir. Dites-moi mon crime, sire.