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voir les événements qui en seront la suite. Je te lègue un bon parlement, une armée éprouvée. Appuie-toi sur le parlement et sur l’armée pour résister à tes seuls ennemis : ma mère et le duc d’Alençon.

En ce moment, on entendit dans le vestibule un bruit sourd d’armes et de commandements militaires.

— Je suis mort, murmura Henri.

— Tu crains, tu hésites, dit Charles avec inquiétude.

— Moi ! sire, répliqua Henri ; non, je ne crains pas ; non, je n’hésite pas ; j’accepte.

Charles lui serra la main. Et comme en ce moment sa nourrice s’approchait de lui, tenant une potion qu’elle venait de préparer dans une chambre voisine, sans faire attention que le sort de la France se décidait à trois pas d’elle :

— Appelle ma mère, bonne nourrice, et dis aussi qu’on fasse venir M. d’Alençon.




XXXIV

le roi est mort : vive le roi !


Catherine et le duc d’Alençon, livides d’effroi et tremblants de fureur tout ensemble, entrèrent quelques minutes après. Comme Henri l’avait deviné, Catherine savait tout et avait tout dit, en peu de mots, à François. Ils firent quelques pas et s’arrêtèrent attendant.

Henri était debout au chevet du lit de Charles.

Le roi leur déclara sa volonté.

— Madame, dit-il à sa mère, si j’avais un fils, vous seriez régente, ou, à défaut de vous, ce serait le roi de Pologne, ou, à défaut du roi de Pologne enfin, ce serait mon frère François ; mais je n’ai pas de fils, et après moi le trône appartient à mon frère le duc d’Anjou, qui est absent. Comme un jour ou l’autre il viendra réclamer ce trône, je ne veux pas qu’il trouve à sa place un homme qui puisse, par des droits presque égaux, lui disputer ses droits, et qui expose