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la porte opposée à celle qui venait de donner passage à Catherine, et s’arrêtant sur le seuil pour humer l’atmosphère alliacée de la chambre.

— Qui donc a brûlé de l’arsenic ? dit-il.

— Moi, répondit Charles.




XXXII

la plate-forme du donjon de vincennes.


Cependant Henri de Navarre se promenait seul et rêveur sur la terrasse du donjon ; il savait la cour au château qu’il voyait à cent pas de lui, et à travers les murailles, son œil perçant devinait Charles moribond.

Il faisait un temps d’azur et d’or : un large rayon de soleil miroitait dans les plaines éloignées, tandis qu’il baignait d’un or fluide la cime des arbres de la forêt, fiers de la richesse de leur premier feuillage. Les pierres grises du donjon elles-mêmes semblaient s’imprégner de la douce chaleur du ciel, et des ravenelles, apportées par le souffle du vent d’est dans les fentes de la muraille, ouvraient leurs disques de velours rouge et jaune aux baisers d’une brise attiédie.

Mais le regard de Henri ne se fixait ni sur ces plaines verdoyantes, ni sur ces cimes chenues et dorées : son regard franchissait les espaces intermédiaires, et allait au delà se fixer ardent d’ambition sur cette capitale de la France, destinée à devenir un jour la capitale du monde.

— Paris, murmurait le roi de Navarre, voilà Paris ; c’est-à-dire la joie, le triomphe, la gloire, le pouvoir et le bonheur ; Paris, où est le Louvre, et le Louvre, où est le trône ; et dire qu’une seule chose me sépare de ce Paris tant désiré !… ce sont les pierres qui rampent à mes pieds et qui renferment avec moi mon ennemie.

Et en ramenant son regard de Paris à Vincennes, il aper-