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— Eh bien ! dit la reine mère, j’ai demandé la maîtresse et non la suivante.

— Madame, dit Gillonne, j’ai cru devoir venir moi-même dire à Votre Majesté que la reine de Navarre est sortie avec son amie la duchesse de Nevers…

— Sortie à cette heure ! reprit Catherine en fronçant le sourcil ; et où peut-elle être allée ?

— À une séance d’alchimie, répondit Gillonne, laquelle doit avoir lieu à l’hôtel de Guise, dans le pavillon habité par madame de Nevers.

— Et quand rentrera-t-elle ? demanda la reine mère.

— La séance se prolongera fort avant dans la nuit, répondit Gillonne, de sorte qu’il est probable que Sa Majesté demeurera demain matin chez son amie.

— Elle est heureuse, la reine de Navarre, murmura Catherine, elle a des amies et elle est reine ; elle porte une couronne, on l’appelle Votre Majesté, et elle n’a pas de sujets ; elle est bien heureuse.

Après cette boutade, qui fit sourire intérieurement les auditeurs :

— Au reste, murmura Catherine, puisqu’elle est sortie ! car elle est sortie, dites-vous ?

— Depuis une demi-heure. Madame.

— Tout est pour le mieux ; allez.

Gillonne salua et sortit.

— Continuez votre lecture, Charlotte, dit la reine.

Madame de Sauve continua.

Au bout de dix minutes Catherine interrompit la lecture.

— Ah ! à propos, dit-elle, qu’on renvoie les gardes de la galerie.

C’était le signal qu’attendait Maurevel.

On exécuta l’ordre de la reine mère, et madame de Sauve continua son histoire.

Elle avait lu un quart d’heure à peu près sans interruption aucune, lorsqu’un cri long, prolongé, terrible, parvint jusque dans la chambre royale et fit dresser les cheveux sur la tête des assistants.

Un coup de pistolet le suivit immédiatement.

— Qu’est-ce cela, dit Catherine, et pourquoi ne lisez-vous plus, Carlotta ?