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— Comme à toi, je présume.

— Et il t’a tout pris ?

— Comme à toi aussi.

— Oh ! moi, je n’avais pas grand-chose, une bague d’Henriette, voilà tout.

— Et de l’argent comptant ?

— J’avais donné tout ce que je possédais à ce brave homme de guichetier pour qu’il nous procurât cette entrevue.

— Ah ! ah ! dit La Mole, il paraît qu’il reçoit des deux mains.

— Tu l’as donc payé aussi, toi ?

— Je lui ai donné cent écus.

— Tant mieux que notre guichetier soit un misérable !

— Sans doute, on en fera tout ce qu’on voudra avec de l’argent, et, il faut l’espérer, l’argent ne nous manquera point.

— Maintenant, comprends-tu ce qui nous arrive ?

— Parfaitement… Nous avons été trahis.

— Par cet exécrable duc d’Alençon. J’avais bien raison de vouloir lui tordre le cou, moi.

— Et crois-tu que notre affaire est grave ?

— J’en ai peur.

— Ainsi, il y a à craindre… la question.

— Je ne te cache pas que j’y ai déjà songé.

— Que diras-tu, si on en vient là ?

— Et toi ?

— Moi, je garderai le silence, répondit La Mole avec une rougeur fébrile.

— Tu te tairas ? s’écria Coconnas.

— Oui, si j’en ai la force.

— Eh bien, moi, dit Coconnas, si on me fait cette infamie, je te garantis que je dirai bien des choses.

— Mais quelles choses ? demanda vivement La Mole.

— Oh ! sois tranquille, de ces choses qui empêcheront pendant quelque temps M. d’Alençon de dormir.

La Mole allait répliquer, lorsque le geôlier, qui sans doute avait entendu quelque bruit, accourut, poussa chacun des deux amis dans sa chambre et referma la porte sur lui.