Page:Dumas - La Reine Margot (1886), tome 2.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.

selle, la terre tournait sous lui. Il éprouva une violente envie de dormir.

— Mon frère ! mon frère ! s’écria Marguerite, qu’avez-vous ?

— J’ai, dit Charles, j’ai ce que dut avoir Porcie quand elle eut avalé ses charbons ardents ; j’ai que je brûle, et qu’il me semble que mon haleine est de flamme.

En même temps Charles poussa son souffle au dehors, et parut étonné de ne pas voir sortir du feu de ses lèvres.

Cependant, on avait repris et rechaperonné le faucon, et tout le monde s’était rassemblé autour de Charles.

— Eh bien ! eh bien ! que veut dire cela ? Corps du Christ ! ce n’est rien, ou si c’est quelque chose, c’est le soleil qui me casse la tête et me crève les yeux. Allons, allons, en chasse, Messieurs ! Voici toute une compagnie de hallebrands. Lâchez tout, lâchez tout. Corbœuf ! nous allons nous amuser !

On déchaperonna en effet et on lâcha à l’instant même cinq ou six faucons, qui s’élancèrent dans la direction du gibier, tandis que toute la chasse, le roi en tête, regagnait les bords de la rivière.

— Eh bien ! que dites-vous, Madame ? demanda Henri à Marguerite.

— Que le moment est bon, dit Marguerite, et que si le roi ne se retourne pas, nous pouvons d’ici gagner la forêt facilement.

Henri appela le valet de vénerie qui portait le héron ; et tandis que l’avalanche bruyante et dorée roulait le long du talus qui fait aujourd’hui la terrasse, il resta seul en arrière comme s’il examinait le cadavre du vaincu.