— Où est le billet que tu étais chargé de remettre au roi de Navarre ?
— Le billet ? balbutia Orthon.
— Oui, ou de déposer en son absence derrière le miroir !
— Moi, Madame ? dit Orthon. Je ne sais ce que vous voulez dire.
— Le billet que de Mouy t’a remis, il y a une heure, derrière le jardin de l’Arbalète.
— Je n’ai point de billet, dit Orthon ; Votre Majesté se trompe bien certainement.
— Tu mens, dit Catherine. Donne le billet, et je tiens la promesse que je t’ai faite.
— Laquelle, Madame ?
— Je t’enrichis.
— Je n’ai point de billet, Madame, reprit l’enfant.
Catherine commença un grincement de dents qui s’acheva par un sourire.
— Veux-tu me le donner, dit-elle, et tu auras mille écus d’or ?
— Je n’ai pas de billet, Madame.
— Deux mille écus.
— Impossible. Puisque je n’en ai pas, je ne puis vous le donner.
— Dix mille écus, Orthon.
Orthon, qui voyait la colère monter comme une marée du cœur au front de la reine, pensa qu’il n’avait qu’un moyen de sauver son maître, c’était d’avaler le billet. Il porta la main à sa poche. Catherine devina son intention et arrêta sa main.
— Allons ! enfant ! dit-elle en riant. Bien, tu es fidèle. Quand les rois veulent s’attacher un serviteur, il n’y a point de mal qu’ils s’assurent si c’est un cœur dévoué. Je sais à quoi m’en tenir sur toi maintenant. Tiens, voici ma bourse comme première récompense. Va porter ce billet à ton maître, et annonce-lui qu’à partir d’aujourd’hui tu es à mon service. Va, tu peux sortir sans moi par la porte qui nous a donné passage : elle s’ouvre en dedans.
Et Catherine, déposant la bourse dans la main du jeune homme stupéfait, fit quelques pas en avant et posa sa main sur le mur.
Cependant le jeune homme demeurait debout et hésitant.