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déterminé que je suis de m’attacher à sa fortune, quelque part qu’elle me conduise : c’est dire à Votre Altesse combien est grande la violence qui m’arrache de son service, en raison de quoi je ne désespère pas d’obtenir mon pardon, et j’ose continuer de me dire avec respect,

« De Votre Altesse royale,
« Monseigneur,
« Le très humble et très obéissant
« Annibal comte de Coconnas,
« ami inséparable de M. de La Mole. »


Ce chef-d’œuvre terminé, Coconnas le lut à haute voix à La Mole qui haussa les épaules.

— Eh bien, qu’en dis-tu ? demanda Coconnas, qui n’avait pas vu le mouvement, ou qui avait fait semblant de ne pas le voir.

— Je dis, répondit La Mole, que M. d’Alençon va se moquer de nous.

— De nous ?

— Conjointement.

— Cela vaut encore mieux, ce me semble, que de nous étrangler séparément.

— Bah ! dit La Mole en riant, l’un n’empêchera peut-être point l’autre.

— Eh bien ! tant pis ! arrive qu’arrive, j’envoie la lettre demain matin. Où allons-nous coucher en sortant d’ici ?

— Chez maître La Hurière. Tu sais, dans cette petite chambre où tu voulais me daguer quand nous n’étions pas encore Oreste et Pylade !

— Bien, je ferai porter ma lettre au Louvre par notre hôte.

En ce moment le panneau s’ouvrit.

— Eh bien ! demandèrent ensemble les deux princesses, sont Oreste et Pylade ?

— Mordi ! Madame, répondit Coconnas, Pylade et Oreste meurent de faim et d’amour.

Ce fut effectivement maître La Hurière qui le lendemain, à neuf heures du matin, porta au Louvre la respectueuse missive de maître Annibal de Coconnas.