j’aime mieux encore l’être par de jolies lèvres comme les vôtres que par une bouche de travers comme la sienne.
— Allons ! dit la duchesse, voilà qui est un peu mieux cependant… Vous disiez donc que vous étiez sorti à neuf heures du Louvre ?
— Oh ! mon Dieu, oui, dans l’intention de venir droit ici, quand, au coin de la rue de Grenelle, j’aperçois un homme qui ressemble à La Mole.
— Bon ! encore La Mole.
— Toujours, avec ou sans permission.
— Brutal !
— Bon ! dit Coconnas, nous allons recommencer nos galanteries.
— Non, mais finissez-en avec vos récits.
— Ce n’est pas moi qui demande à les faire, c’est vous qui me demandez pourquoi je suis en retard.
— Sans doute ; est-ce à moi d’arriver la première ?
— Eh ! vous n’avez personne à chercher, vous.
— Vous êtes assommant, mon cher ; mais continuez. Enfin, au coin de la rue de Grenelle, vous apercevez un homme qui ressemble à La Mole… Mais qu’avez-vous donc à votre pourpoint ? du sang !
— Bon ! en voilà encore un qui m’aura éclaboussé en tombant.
— Vous vous êtes battu ?
— Je le crois bien.
— Pour votre La Mole ?
— Pour qui voulez-vous que je me batte ? pour une femme ?
— Merci !
— Je le suis donc cet homme qui avait l’impudence d’emprunter des airs de mon ami. Je le rejoins à la rue Coquillière, je le devance, je le regarde sous le nez à la lueur d’une boutique. Ce n’était pas lui.
— Bon ! c’était bien fait.
— Oui, mais mal lui en a pris. Monsieur, lui ai-je dit, vous êtes un fat de vous permettre de ressembler de loin à mon ami M. de La Mole, lequel est un cavalier accompli ; tandis que de près on voit bien que vous n’êtes qu’un truand. Sur ce, il a mis l’épée à la main et moi aussi. À la troisième passe, voyez le mal appris ! il est tombé en m’éclaboussant.