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— Oh oui ! mon enfant, comme tout ce qui vient de toi.

Et la pauvre Marie laissa tomber sa tête sur le chevet du lit, couvrant de ses cheveux le front humide du mourant.

— Oh ! si tu restais ainsi, murmura Nodier, je ne mourrais jamais[1].

La mort frappait toujours.

Les extrémités commençaient à se refroidir ; mais, au fur et à mesure que la vie remontait, elle se concentrait au cerveau et faisait à Nodier un esprit plus lucide qu’il ne l’avait jamais eu.

Alors il bénit sa femme et ses enfans, puis il demanda le quantième du mois.

— Le 27 janvier, dit Mme Nodier.

— Vous n’oublierez pas cette date, n’est-ce pas, mes amis ? dit Nodier.

Puis, se tournant vers la fenêtre :

— Je voudrais bien voir encore une fois le jour, fit-il avec un soupir.

Puis il s’assoupit.

Puis son souffle devint intermittent.

Puis enfin, au moment où le premier rayon du jour frappa les vitres, il rouvrit les yeux, fit du regard un signe d’adieu et expira.

Avec Nodier tout mourut à l’Arsenal, joie, vie et lumière ; ce fut un deuil qui nous prit tous ; chacun perdait une portion de lui-même en perdant Nodier.

  1. Francis Wey a publié, sur les derniers momens de Nodier, une notice pleine d’intérêt, mais écrite pour les amis, et tirée à vingt-cinq exemplaires seulement.