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mann. Donc Arsène l’avait remarqué, puisqu’elle payait la peine de sa distraction ; donc Arsène souffrait pour lui ; il était entré dans la vie de la belle danseuse par la porte de la douleur, mais il y était entré, c’était le principal ; à lui de s’y maintenir. Mais comment ? par quel moyen ? par quelle voie correspondre avec Arsène, lui donner de ses nouvelles, lui dire qu’il l’aimait ? C’eût été déjà une grande tâche pour un Parisien pur sang, que de retrouver cette belle Arsène perdue dans cette immense ville. C’était une tâche impossible pour Hoffmann, arrivé depuis trois jours et ayant grand-peine à se retrouver lui-même.

Hoffmann ne se donna donc même pas la peine de chercher ; il comprenait que le hasard seul pouvait venir à son aide. Tous les deux jours, il regardait l’affiche de l’Opéra, et tous les deux jours il avait la douleur de voir que Pâris rendait son jugement en l’absence de celle qui méritait la pomme bien autrement que Vénus.

Dès lors il ne songea pas à aller à l’Opéra.

Un instant il eut bien l’idée d’aller soit à la Convention, soit aux Cordeliers, de s’attacher aux pas de Danton et, en l’épiant jour et nuit, de deviner où il avait caché la belle danseuse. Il alla même à la Convention, il alla même aux Cordeliers ; mais Danton n’y était plus : depuis sept ou huit jours Danton n’y venait plus ; las de la lutte qu’il soutenait depuis deux ans, vaincu par l’ennui bien plus que par la supériorité, Danton paraissait s’être retiré de l’arène politique.

Danton, disait-on, était à sa maison de campagne. Où était cette maison de campagne ? on n’en savait rien : les uns disaient à Rueil, les autres à Auteuil.