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les plus beaux échantillons de calligraphie grotesque dont on eût pu parler jusqu’à ce jour.

Hoffmann avait sa feuille de route d’une exiguïté remarquable. C’était le temps des exiguïtés : journaux, livres, publications de colportage, tout se réduisait au simple in-octavo pour les plus grandes mesures. La feuille de route du voyageur, disons-nous, fut envahie dès l’Alsace par des signatures de fonctionnaires qui ne ressemblaient pas mal à ces zigzags d’ivrognes qui toisent diagonalement les rues en battant l’une et l’autre muraille.

Force fut donc à Hoffmann de joindre une feuille à son passeport, puis, une autre en Lorraine, où surtout les écritures prirent des proportions colossales. Là où le patriotisme était le plus chaud, les écrivains étaient plus naïfs. Il y eut un maire qui employa deux feuilles, recto et verso, pour donner à Hoffmann un autographe ainsi conçu :

xxxx« Auphemann, chune Allemans, ami de la libreté, se rendan à Pari ha pié.
» Signé, Golier. »

Muni de ce parfait document sur sa patrie, son âge, ses principes, sa destination et ses moyens de transport, Hoffmann ne s’occupa plus que du soin de coudre ensemble tous ces lambeaux civiques, et nous devons dire qu’en arrivant à Paris, il possédait un assez joli volume, que, disait-il, il ferait relier en ferblanc, si jamais il tentait un nouveau voyage, parce que, forcé d’avoir toujours ces feuilles à la main, elles risquaient trop dans un simple carton.

Partout on lui répétait :