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par une influence contraire à la sienne, prit connaissance de quelque nouvelle particularité non moins dangereuse pour lui que ses secrets politiques ; de sorte que Balsamo, disons-nous, après avoir, si l’on peut s’exprimer ainsi, chargé Lorenza d’une nouvelle couche de fluide, sortit pour se rendre près d’Althotas.

Il était temps qu’il arrivât ; la trappe était déjà à moitié chemin du plafond. Allhotas avait quitté son fauteuil roulant, et se montrait accroupi sur cette partie mobile du plancher qui s’élevait et descendait.

Il vit sortir Balsamo de la chambre de Lorenza.

Ainsi accroupi, le vieillard était à la fois terrible et hideux à voir.

Sa figure blanche — dans quelques parties de cette figure qui semblait vivante encore — s’était empourprée du feu de la colère ; ses mains effilées et noueuses, comme celles d’un squelette de main humaine, tremblotaient en cliquetant ; ses yeux caves semblaient vaciller dans leur orbite profonde, et, dans une langue inconnue, même de son élève, il proférait les invectives les plus violentes contre lui.

Sorti de son fauteuil pour faire jouer le ressort, il semblait ne vivre et ne se mouvoir qu’à l’aide de ses deux longs bras, grêles et arrondis comme ceux de l’araignée ; et sortant, comme nous l’avons dit, de sa chambre inaccessible à tous, excepté à Balsamo, il était en train de se transporter dans la chambre inférieure.

Pour que ce faible vieillard, si paresseux, eût quitté son fauteuil, intelligente machine qui lui épargnait toute fatigue ; pour qu’il eût consenti à accomplir un de ces actes de la vie vulgaire ; pour qu’il se fût donné le souci et la fatigue d’opérer un pareil changement dans ses habitudes, il fallait qu’une extraordinaire surexcitation l’eût fait sortir de sa vie contemplative et forcé de rentrer dans la vie réelle.

Balsamo, surpris en quelque sorte en flagrant délit, s’en montra d’abord étonné, puis inquiet.

— Ah ! s’écria Althotas, te voilà, fainéant ! te voilà, lâche, qui abandonnes ton maître !