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— Non.

— Tu refuses de te défendre ?

— Oui.

— Eh bien, meurs comme un scélérat dont je purge la terre, meurs comme un sacrilège, meurs comme un bandit, meurs comme un chien !

Et Philippe lâcha son coup de pistolet presque à bout portant sur Gilbert. Celui-ci étendit les bras, pencha d’abord en arrière, puis en avant, et tomba sur la face sans pousser un cri. Philippe sentit le sable s’imprégner sous son pied d’un sang tiède ; il perdit tout à fait la raison, et s’élança hors de la taverne.

Devant lui était le rivage ; une barque attendait ; l’heure du départ avait été annoncée du bord pour huit heures ; il était huit heures et quelques minutes.

— Ah ! vous voilà, monsieur, lui dirent les matelots… vous êtes le dernier… chacun a regagné le bord. Qu’avez-vous tué ?

Philippe, entendant ce mot, perdit connaissance. On le rapporta ainsi au navire qui commençait d’appareiller.

— Tout le monde est rentré ? demanda le capitaine.

— Voici le dernier passager que nous ramenons, répondirent les matelots. Il aura fait une chute, car il vient de s’évanouir.

Le capitaine commanda une manœuvre décisive, et le brick s’éloigna rapidement des îles Açores, juste au moment où le bâtiment inconnu qui l’avait si longtemps inquiété entrait dans le port sous le pavillon américain.

Le capitaine de l’Adonis échangea un signal avec ce bâtiment, et rassuré, en apparence du moins, il continua sa route vers l’occident, et se perdit bientôt dans les ombres de la nuit.

Ce ne fut que le lendemain que l’on s’aperçut qu’un passager manquait à bord.