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qui me l’ont fait infliger trouveraient moyen de me frapper plus fort, me voyant plus élevé.

— Quoi ! même avec ma protection ?

— Surtout avec votre gracieuse protection, madame, dit Philippe résolument.

— C’est vrai ! murmura la princesse en pâlissant.

— Et puis, madame, non… j’oubliais, j’oubliais, en vous parlant, qu’il n’y a plus de bonheur sur la terre… j’oubliais que, rentré dans l’ombre, je n’en dois plus sortir ; dans l’ombre, un homme de cœur prie et se souvient !

Philippe prononça ces mots avec un accent qui fit tressaillir la princesse.

— Un jour viendra, dit-elle, où j’aurai le droit de dire ce que je ne puis que penser en ce moment. Monsieur, votre sœur peut, dès qu’il lui plaira, entrer à Saint-Denis.

— Merci, madame, merci.

— Quant à vous… je veux que vous m’adressiez une demande.

— Mais, madame.

— Je le veux !

Philippe vit s’abaisser vers lui la main gantée de la princesse ; cette main demeurait suspendue comme dans l’attente ; peut-être n’exprimait-elle que la volonté.

Le jeune homme s’agenouilla, prit cette main, et, lentement, avec un cœur gonflé, palpitant, il y posa ses lèvres.

— Cette demande ! voyons, dit la dauphine si émue qu’elle ne retira pas sa main.

Philippe courba la tête. Un flot d’amères pensées l’engloutit comme le naufragé dans une tempête… Il demeura quelques secondes muet et immobile, puis, se relevant décoloré et les yeux éteints :

— Un passeport pour quitter la France, dit-il, le jour où ma sœur entrera dans le couvent de Saint-Denis.

La dauphine recula comme épouvantée ; puis, voyant toute cette douleur que sans doute elle comprit, que peut-être elle partageait, elle ne trouva rien à répondre que ces mots à peine intelligibles :