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à son compagnon, qui, pendant tout le voyage, avait gardé un morne silence :

— Monsieur, lui dit-il, force nous sera, j’en ai bien peur, d’attendre quelque temps ici. Les portes ne s’ouvrent pas à Trianon avant cinq heures du matin, et je craindrais, en forçant la consigne, que notre arrivée ne semblât suspecte aux surveillants et aux gardes.

Balsamo ne répondit rien, mais témoigna, par un mouvement de tête, qu’il acquiesçait à la proposition.

— D’ailleurs, monsieur, continua Philippe, ce retard me donnera le temps de vous faire part de quelques réflexions faites pendant mon voyage.

Balsamo leva sur Philippe un regard vague tout chargé d’ennui et d’indifférence.

— Comme il vous plaira, monsieur, dit-il ; parlez, je vous écoute.

— Vous m’avez dit, monsieur, reprit Philippe, que, pendant la nuit du 31 mai, vous aviez déposé ma sœur chez madame la marquise de Saverny ?

— Vous vous en êtes assuré vous-même, monsieur, dit Balsamo, puisque vous avez fait une visite de remerciement à cette dame. Vous avez donc ajouté que, puisqu’un domestique des écuries du roi vous avait accompagné de l’hôtel de la marquise chez nous, c’est-à-dire rue Coq-Héron, vous ne vous étiez pas trouvé seul avec elle ; je vous ai cru sur la foi de votre honneur.

— Et vous avez bien fait, monsieur.

— Mais, en ramenant ma pensée sur des circonstances plus récentes, j’ai été forcé de me dire qu’il y a un mois, à Trianon, pour lui parler, cette nuit où vous avez trouvé moyen de vous glisser dans les jardins, vous avez dû entrer dans sa chambre.

— Je ne suis jamais entré, à Trianon, dans la chambre de votre sœur, monsieur. `

— Écoutez, cependant !… Voyez-vous, avant que d’arriver en face d’Andrée, il faut que toutes choses soient claires.