— Eh ! monsieur, je vous l’ai déjà dit, je sais le nom sous lequel il se cache ; mais…
— Mais vous ne savez point celui sous lequel il se montre, n’est-ce pas ?
— Justement, sans quoi…
— Sans quoi vous le feriez arrêter ?
— Immédiatement.
— Eh bien, mon cher monsieur de Sartine, c’est bien heureux, comme vous me le disiez tout à l’heure, que je sois arrivé en ce moment, car je vais vous rendre le service que vous me demandiez.
— Vous ?
— Oui.
— Vous allez me dire son nom ?
— Oui.
— Le nom sous lequel il se montre ?
— Oui.
— Vous le connaissez donc ?
— Parfaitement.
— Et quel est ce nom ? demanda M. de Sartine en expectative de quelque mensonge.
— Le comte de Fœnix.
— Comment ! le nom sous lequel vous vous êtes fait annoncer ?…
— Le nom sous lequel je me suis fait annoncer, oui.
— Votre nom ?
— Mon nom.
— Alors, cet Acharat, ce Somini, ce marquis d’Anna, ce marquis Pellegrini, ce Joseph Balsamo, c’est vous ?
— Mais oui, dit simplement Balsamo, c’est moi-même.
M. de Sartine prit une minute pour se remettre de l’éblouissement que lui causa cette effrontée franchise.
— J’avais deviné, vous voyez, dit-il… Je vous connaissais, je savais que ce Balsamo et ce comte de Fœnix ne faisaient qu’un.
— Ah ! vous êtes un grand ministre, dit Balsamo, je l’avoue.