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pas manquer l’heure, ajoutant que telle chose bonne en soi, l’était surtout dans son opportunité.

Andrée, confuse du reproche, et pénétrée surtout de l’injustice, ne répliqua rien, quoiqu’elle eût pu dire qu’elle avait été retenue par son père, et forcée de venir lentement, attendu qu’elle était souffrante.

Non, troublée, oppressée, elle pencha la tête, et, comme si elle allait mourir, ferma les yeux et perdit l’équilibre.

Sans madame de Noailles, elle tombait.

— Que vous avez peu de maintien, mademoiselle ! murmura madame l’Étiquette.

Andrée ne répondit pas.

— Mais, duchesse, elle se trouve mal ! s’écria la dauphine en se levant pour courir à Andrée.

— Non, non, répliqua vivement Andrée, les yeux pleins de larmes ; non, Votre Altesse, je suis bien, ou plutôt je suis mieux.

— Mais elle est blanche comme son mouchoir, duchesse, voyez donc. Au fait, c’est ma faute, je l’ai grondée : pauvre enfant, asseyez-vous, je le veux.

— Madame…

— Voyons, quand j’ordonne !… Donnez-lui votre pliant, l’abbé.

Andrée s’assit, et, peu à peu, sous la douce influence de cette bonté, son esprit se rasséréna, les couleurs remontèrent à ses joues.

— Eh bien, mademoiselle, pouvez-vous lire, maintenant ? demanda la dauphine.

— Oh ! oui, bien certainement ; je l’espère du moins.

— Et Andrée ouvrit le livre à l’endroit où elle avait abandonné sa lecture de la veille, et, d’une voix qu’elle essayait de poser pour la rendre la plus intelligible et la plus agréable possible, elle commença.

Mais à peine ses regards eurent-ils parcouru la valeur de deux ou trois pages, que de petits atomes noirs voltigeant devant ses yeux se mirent à tourbillonner, à trembloter, et devinrent indéchiffrables.