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LXI

LES RENSEIGNEMENTS.


Cette nuit si longue, si fertile en événements et que nous avons promenée, comme le nuage des dieux mythologiques, de Saint-Denis à La Muette, de La Muette à la rue Coq-Héron, de la rue Coq-Héron à la rue Plâtrière, et de la rue Plâtrière à la rue Saint-Claude, cette nuit, madame Dubarry l’avait employée à essayer de pétrir l’esprit du roi, selon ses vues, d’une politique nouvelle.

Elle avait surtout beaucoup insisté sur le danger qu’il y aurait à laisser les Choiseul gagner du terrain auprès de la dauphine.

Le roi avait répondu, en haussant les épaules, que madame la dauphine était une enfant et M. de Choiseul un vieux ministre ; qu’en conséquence il n’y avait pas de danger, attendu que l’une ne saurait pas travailler et que l’autre ne saurait pas amuser. Puis, enchanté de ce bon mot, le roi avait coupé court aux explications. Il n’en avait pas été de même de madame du Barry, qui avait cru remarquer des distractions chez le roi.

Louis XV était coquet. Son grand bonheur consistait à donner de la jalousie à ses maîtresses, pourvu cependant que cette jalousie ne se traduisît point par des querelles et des bouderies trop prolongées.

Madame Dubarry était jalouse, d’abord par amour-propre, ensuite par crainte. Sa position lui avait donné trop de peine à conquérir, et la position élevée où elle se trouvait était trop éloignée de son point de départ pour qu’elle osât, comme madame de Pompadour, tolérer d’autres maîtresses au roi, et lui