— Oui, mon ami, c’est mon élixir, c’est-à-dire la vie, que dis-je la vie ! l’éternité de la vie.
— Oh ! oh ! fit Balsamo attristé, car il regardait cette recherche comme une œuvre folle, c’est encore de ce rêve que vous vous occupez ?
Mais Althotas, sans écouter, mirait amoureusement sa fiole.
— Enfin, dit-il, la combinaison est trouvée : élixir d’Aristée, vingt grammes, baume de mercure, quinze grammes, précipité d’or, quinze grammes, essence de cèdres du Liban, vingt-cinq grammes.
— Mais il me semble, qu’à l’élixir d’Aristée près, c’est votre dernière combinaison, maître ?
— Oui, mais il y manquait l’ingrédient principal, celui qui relie tous les autres, celui sans lequel les autres ne sont rien.
— Et vous l’avez trouvé, celui-là ?
— Je l’ai trouvé.
— Vous pouvez vous le procurer ?
— Pardieu !
— Quel est-il ?
— Il faut ajouter aux matières déjà combinées dans cette fiole, les trois dernières gouttes du sang artériel d’un enfant.
— Eh bien, mais cet enfant, dit Balsamo épouvanté, où l’aurez-vous ?
— Tu me le procureras.
— Moi ?
— Oui, toi.
— Vous êtes fou, maître.
— Eh bien, quoi ? demanda l’impassible vieillard en promenant avec délices sa langue sur l’extérieur du flacon où, par le bouchon mal clos, suintait une goutte d’eau, eh bien, quoi ?…
— Et vous voulez avoir un enfant pour prendre les trois dernières gouttes de son sang artériel ?
— Oui.
— Mais il faut tuer l’enfant pour cela ?
— Sans doute, il faut le tuer, plus il sera beau, mieux cela vaudra.