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— Et, comme Votre Majesté eut la bonté de me dire hier de ne jamais regarder comme sérieuse une lettre qui ne serait pas ratifiée par la parole expresse du roi, je viens demander l’explication.

— Elle sera courte, monsieur le duc, répondit le roi. Aujourd’hui, la lettre est valable.

— Valable ! dit le duc, une lettre aussi offensante pour un serviteur aussi dévoué…

— Un serviteur dévoué, monsieur, ne fait pas jouer à son maître un rôle ridicule.

— Sire, dit le ministre avec hauteur, je croyais être né assez près du trône pour en comprendre la majesté.

— Monsieur, répartit le roi d’une voix brève, je ne veux pas vous faire languir. Hier au soir, dans le cabinet de votre hôtel, à Versailles, vous avez reçu un courrier de madame de Grammont.

— C’est vrai, sire.

— Il vous a remis une lettre.

— Est-il défendu, sire, à un frère et à une sœur de correspondre ?

— Attendez, s’il vous plaît, je sais le contenu de cette lettre.

— Oh ! sire…

— Le voici… j’ai pris la peine de le transcrire de ma main.

Et le roi tendit au duc une copie exacte de la lettre qu’il avait reçue.

— Sire !…

— Ne niez pas, monsieur le duc, vous avez serré cette lettre en un coffret de fer placé dans la ruelle de votre lit.

Le duc devint pâle comme un spectre.

— Ce n’est pas tout, continua impitoyablement le roi, vous avez répondu à madame de Grammont. Cette lettre, j’en sais le contenu également. Cette lettre, elle est là, dans votre portefeuille, et n’attend pour partir qu’un post-scriptum, que vous devez ajouter en me quittant… Vous voyez que je suis instruit, n’est-ce pas ?

Le duc essuya son front mouillé d’une sueur glacée, s’inclina