lui-même de la démarche qu’il allait faire, traversait lentement la cour du château et se rendait à l’appartement de M. de Choiseul.
Pendant ce temps, toutes les conversations éclataient, menaçantes ou timides, autour du vieux maréchal, qui faisait l’étonné plus que les autres, mais dont, grâce à certain sourire précieux, nul n’était dupe.
M. de La Vrillière revint et fut entouré aussitôt.
— Eh bien ? lui dit-on.
— Eh bien ! c’était un ordre d’exil.
— D’exil ?
— Oui, en bonne forme.
— Vous l’avez lu, duc ?
— Je l’ai lu.
— Positif
— Jugez-en.
Et le duc de La Vrillière prononça les paroles suivantes qu’il avait retenues avec cette mémoire implacable qui constitue les courtisans :
« Mon cousin, le mécontentement que me causent vos services me force à vous exiler à Chanteloup, où vous vous rendrez dans les vingt-quatre heures. Je vous aurais envoyé plus loin si ce n’était l’estime particulière que j’ai pour madame de Choiseul, dont la santé m’est fort intéressante. Prenez garde que votre conduite ne me fasse prendre un autre parti. »
Un long murmure courut dans le groupe qui enveloppait M. le duc de La Vrillière.
— Et que vous a-t-il répondu, monsieur de Saint-Florentin ? demanda Richelieu, affectant de ne donner au duc ni son nouveau titre ni son nouveau nom.
— Il m’a répondu :
« Monsieur le duc, je suis persuadé de tout le plaisir que vous avez à m’apporter cette lettre. »
— C’était dur, mon pauvre duc, fit Jean.
— Que voulez-vous, monsieur le vicomte ! on ne reçoit pas une pareille tuile sur la tête sans crier un peu.