— Oh ! je suis bien sûr que le roi n’aura rien changé au programme.
— Maintenant, votre plan à vous, duc, car c’est à votre tour de le donner ?
— Madame, dès hier j’ai écrit à mon neveu, qui, du reste, si j’en crois mes pressentiments, doit déjà être en route.
— M. d’Aiguillon ?
— Je serais bien étonné qu’il ne se croisât pas demain avec ma lettre, et qu’il ne fût pas ici demain ou après-demain au plus tard.
— Et vous comptez sur lui ?
— Eh ! madame, il a des idées.
— N’importe, nous sommes bien malades ; le roi même céderait, mais il a une peur horrible des affaires.
— De sorte que ?…
— De sorte que je tremble qu’il ne consente jamais à sacrifier M. de Choiseul.
— Voulez-vous que je vous parle franc, comtesse ?
— Certainement.
— Eh bien, je ne le crois pas non plus. Le roi aura cent tours pareils à celui d’hier, Sa Majesté a tant d’esprit ! Vous, de votre côté, comtesse, vous n’irez pas risquer de perdre son amour par un entêtement inconcevable.
— Dame ! c’est à réfléchir.
— Vous voyez bien, comtesse, que M. de Choiseul est là pour une éternité ; pour l’en déloger, il ne faudrait rien moins qu’un miracle.
— Oui, un miracle, répéta Jeanne.
— Et malheureusement les hommes n’en font plus, répondit le duc.
— Oh ! répliqua madame du Barry, j’en connais un qui en fait encore, moi.
— Vous connaissez un homme qui fait des miracles, comtesse ?
— Ma foi, oui.
— Et vous ne m’avez pas dit cela ?
— J’y pense à cette heure seulement, duc.