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— De vous ennuyer ?

— Non, mais de chercher à nous divertir.

— Et Votre Altesse Royale veut faire bâtir ? dit M. de Choiseul.

— De ce parc, monsieur le duc, je veux faire un jardin.

— Ah ! ce pauvre Le Nôtre, dit le roi.

— Le Nôtre était un grand homme, sire, pour ce que l’on aimait alors, mais pour ce que j’aime…

— Qu’aimez-vous, madame ?

— La nature.

— Ah ! comme les philosophes.

— Ou comme les Anglais.

— Bon ! dites cela devant Choiseul, vous allez avoir une déclaration de guerre. Il va vous lâcher les soixante-quatre vaisseaux et les quarante frégates de M. de Praslin, son cousin.

— Sire, dit la dauphine, je ferai dessiner un jardin naturel par M. Robert, le plus habile homme du monde pour ces sortes de plans.

— Qu’appelez-vous jardins naturels ? dit le roi. Je croyais que des arbres et des fleurs, voire même des fruits, comme ceux que j’ai cueillis en passant, étaient des choses naturelles.

— Sire, vous vous promèneriez cent ans chez vous que vous verriez toujours des allées droites, ou des massifs taillés à angle de quarante-cinq degrés, comme dit M. le dauphin, ou des pièces d’eau mariées à des gazons, lesquels sont mariés à des perspectives, ou à des quinconces, ou à des terrasses.

— Eh bien, c’est donc laid, cela ?

— Ce n’est pas naturel.

— Que voilà une petite fille qui aime la nature ! dit le roi avec un air plus jovial que joyeux. Voyons ce que vous ferez de mon Trianon.

— Des rivières, des cascades, des ponts, des grottes, des rochers, des bois, des ravins, des maisons, des montagnes, des prairies.

— Pour des poupées ? dit le roi.

— Hélas ! sire, pour des rois tels que nous serons, répliqua