Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/219

Cette page n’a pas encore été corrigée

— Et aux amis, comtesse ; permettez-moi donc à ce titre d’en prendre ma part. Ainsi donc…

— Ainsi donc, vous êtes de mes amis ?

— Je croyais vous l’avoir dit, madame.

— Ce n’est point assez.

— Je croyais vous l’avoir prouvé.

— C’est mieux, et vous m’aiderez ?

— De tout mon pouvoir, comtesse ; mais…

— Mais quoi ?

— L’œuvre est difficile, je ne vous le cache point.

— Sont-ils donc indéracinables, ces Choiseul ?

— Ils sont vigoureusement plantés, du moins.

— Vous croyez, vous ?

— Je le crois.

— Ainsi, quoi qu’en dise le bonhomme La Fontaine, il n’y a contre ce chêne ni vent ni orage ?

— C’est un grand génie que ce ministre.

— Bon ! voilà que vous parlez comme les encyclopédistes, vous !

— Ne suis je pas de l’Académie ?

— Oh ! vous en êtes si peu, duc.

— C’est vrai, et vous avez raison ; c’est mon secrétaire qui en est, et non pas moi. Mais je n’en persiste pas moins dans mon opinion.

— Que M. de Choiseul est un génie ?

— Eh ! oui.

— Mais en quoi éclate-t-il donc, ce grand génie, voyons ?

— En ceci, madame : qu’il a fait une telle affaire des parlements et des Anglais, que le roi ne peut plus se passer de lui.

— Les parlements, mais il les excite contre Sa Majesté !

— Sans doute, et voilà l’habileté.

— Les Anglais, il les pousse à la guerre !

— Justement, la paix le perdrait.

— Ce n’est pas du génie, cela, duc.

— Qu’est-ce donc, comtesse ?

— C’est de la haute trahison.