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LXXIII

LE FRÈRE ET LA SŒUR.


Gilbert entendait et voyait, avons-nous dit.

Il voyait Andrée couchée sur sa chaise-longue, le visage tourné vers la porte vitrée, c’est-à-dire tout à fait en face de lui. Cette porte était légèrement entrebâillée.

Une petite lampe à large abattoir, placée sur une table voisine chargée de livres, indiquant la seule distraction à laquelle pouvait se livrer la belle malade, éclairait le bas seulement du visage de mademoiselle de Taverney.

Quelquefois, cependant, lorsqu’elle se renversait en arrière, de façon à être adossée à l’oreiller de la chaise-longue, la clarté envahissait son front si blanc et si pur sous la dentelle.

Philippe, assis sur le pied même de la chaise-longue, tournait le dos à Gilbert ; son bras était toujours en écharpe, et tout mouvement était défendu à ce bras.

C’était la première fois qu’Andrée se levait ; c’était la première fois que Philippe sortait.

Les deux jeunes gens ne s’étaient donc pas revus depuis la terrible nuit ; seulement, chacun des deux avait su que l’autre allait de mieux en mieux et marchait à sa convalescence.

Tous deux, réunis depuis quelques minutes à peine, causaient donc librement, car ils savaient qu’ils étaient seuls, et que, s’il venait quelqu’un, ils seraient prévenus de l’approche de ce quelqu’un par le bruit de la sonnette placée à cette porte, que Nicole avait laissée ouverte.

Mais tout naturellement ils ignoraient cette circonstance de la porte laissée ouverte, et comptaient sur la sonnette.

Gilbert voyait donc et entendait donc, comme nous avons