core devant elle et continuer enfin ce manège jusqu’à ce qu’elle fût au bord de la plate-bande sous l’espalier.
Là, Nicole leva les mains pour détacher ses dentelles, en laissa tomber une qu’elle ramassa longuement, et, en la ramassant, s’empara de la pierre.
Gilbert ne devinait rien encore, mais, en voyant Nicole éplucher cette pierre, comme un gourmand fait d’une noix, et lui enlever une écorce de papier qu’elle avait, il comprit le degré d’importance réel que méritait l’aérolithe.
C’était, en effet, ni plus ni moins qu’un billet que Nicole venait de trouver roulé autour de la pierre.
La rusée l’eut bien vite déplié, dévoré, mis dans sa poche, et alors elle n’eut plus besoin de regarder rien à ses dentelles, les dentelles étaient sèches.
Gilbert, cependant, secouait la tête en se disant, avec cet égoïsme des hommes qui déprécient les femmes, que Nicole était bien réellement une nature vicieuse, et que lui, Gilbert, avait fait acte de morale et de saine politique en rompant si brusquement et si courageusement avec une fille qui recevait des billets par-dessus les murs.
Et, en raisonnant ainsi, lui, Gilbert, qui venait de faire un si beau raisonnement sur les causes et les effets, il condamnait un effet dont peut-être il était la cause.
Nicole rentra, puis ressortit, et cette fois elle avait la main dans sa poche.
Elle en tira une clef ; Gilbert la vit un instant briller entre ses doigts comme un éclair, puis aussitôt, cette clef, la jeune fille la glissa sous la petite porte du jardin, porte de jardinier située à l’autre extrémité du mur de la rue, parallèlement à la grande porte usitée.
— Bon ! dit Gilbert, je comprends : un billet et un rendez-vous. Nicole ne perd pas son temps. Nicole a donc un nouvel amant ?
Et Gilbert fronça le sourcil avec le désappointement d’un homme qui a cru que sa perte devait causer un vide irréparable dans le cœur de la femme qu’il abandonnait, et qui, à son grand étonnement, voit ce vide parfaitement rempli.