Page:Dumas - Joseph Balsamo, Lévy frères, 1872, volume 3.djvu/120

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

— Pas mal.

— Alors, sire, M. de la Vauguyon a fait un grand salut, toujours accompagné de regards fort allumés, qui semblaient vouloir pénétrer dans le corridor ; puis il a laissé monseigneur à la porte.

— Et monseigneur est entré, je suppose ?

— Tenez, sire, voyez la lumière dans la galerie. Il y a au moins un quart d’heure qu’elle s’y promène.

— Allons ! allons ! elle disparaît, dit le roi après quelques instants passés les yeux levés sur les vitres. À moi aussi, on m’avait donné vingt minutes, mais je me rappelle qu’au bout de cinq j’étais chez ma femme. Hélas ! dira-t-on de M. le dauphin ce qu’on disait du second Racine : « C’est le petit fils d’un grand-père ! »


LXV

LA NUIT DES NOCES DE M. LE DAUPHIN.


Le dauphin ouvrit la porte de la chambre nuptiale, ou plutôt de l’antichambre qui la précédait.

L’archiduchesse, en long peignoir blanc, attendait dans le lit doré, à peine affaissé par le poids si léger de son corps frêle et délicat ; et, chose étrange, si l’on eût pu lire sur son front, à travers le nuage de tristesse qui le couvrait, on y eût reconnu, au lieu de la douce attente de la fiancée, la terreur de la jeune fille menacée d’un de ces dangers que les natures nerveuses voient en pressentiments et supportent quelquefois avec plus de courage qu’elles ne les ont pressentis.

Près du lit, madame de Noailles était assise.

Les dames se tenaient au fond, attentives au premier geste de la dame d’honneur, qui leur ordonnerait de se retirer.

Celle-ci, fidèle aux lois de l’étiquette, attendait impassiblement l’arrivée de M. le dauphin.