— Mais attendez donc, que je vous apprenne pourquoi vous y allez.
— C’est vrai, sire ; mais mon empressement à obéir à Sa Majesté est tel…
— Très bien. Vous suivrez donc M. de la Vauguyon.
— Oui, sire.
— Il est si troublé, si chagrin, que je crains son attendrissement pour M. le dauphin.
— Et que dois-je faire, sire, s’il s’attendrit ?
— Rien ; vous viendrez me le dire, voilà tout.
Lebel déposa le café auprès du roi, qui se mit à le savourer lentement.
Puis le valet de chambre historique sortit.
Un quart d’heure après, il reparut.
— Eh bien, Lebel ? demanda le roi.
— Sire, M. de la Vauguyon a été jusqu’au corridor neuf, tenant monseigneur par le bras.
— Bien, après ?
— Il ne semblait pas fort attendri, bien au contraire, il roulait de petits yeux tout égrillards.
— Bon, après ?
— Il a tiré une clé de sa poche, l’a donnée à M. le dauphin, qui a ouvert la porte et a mis le pied dans le corridor.
— Ensuite ?
— Ensuite, M. le duc a fait passer son bougeoir dans la main de monseigneur et lui a dit tout bas, mais pas si bas que je n’aie pu l’entendre :
« — Monseigneur, la chambre nuptiale est au bout de cette galerie dont je viens de vous remettre la clé. Le roi désire que vous mettiez vingt minutes à arriver à cette chambre.
« — Comment ! a dit le prince, vingt minutes ; mais il faut vingt secondes à peine.
« — Monseigneur, a répondu M. de La Vauguyon, ici expire mon autorité. Je n’ai plus, de leçons à vous donner, mais un dernier conseil : regardez bien les murailles à droite et à gauche de cette galerie, et je réponds à Son Altesse qu’elle trouvera le temps d’employer ses vingt minutes. »