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Et madame du Barry tendit au roi sa jolie petite main, dans laquelle Louis XV laissa tomber la sienne.

Ce matin-là, tout Luciennes se ressentit de la gaieté du maître ; il avait cédé sur un point sur lequel depuis longtemps il était décidé à céder ; mais il avait gagné sur un autre. C’était donc tout bénéfice : il donnerait cent mille livres à Jean, à condition qu’il irait les perdre aux eaux des Pyrénées ou d’Auvergne, et cela passerait pour un exil aux yeux des Choiseul. Il y eut des louis d’or pour les pauvres, des gâteaux pour les carpes et des compliments pour les peintures de Boucher.

Quoiqu’elle eût parfaitement soupé la veille, Sa Majesté déjeuna de grand appétit.

Cependant, onze heures venaient de sonner. La comtesse, tout en servant le roi, lorgnait la pendule, trop lente à son gré.

Le roi lui-même avait pris la peine de dire que si madame de Béarn arrivait, on pouvait l’introduire dans la salle à manger.

Le café fut servi, goûté, bu, sans que madame de Béarn arrivât.

À onze heures un quart, on entendit retentir dans la cour le galop d’un cheval.

Madame du Barry se leva rapidement et regarda par la fenêtre. Un courrier de Jean du Barry sautait à bas d’un cheval ruisselant de sueur.

La comtesse frissonna ; mais, comme elle ne devait laisser rien voir de ses inquiétudes, afin de maintenir le roi dans ses bonnes dispositions, elle revint s’asseoir près de lui.

Un instant après, Chon entra, un billet dans sa main.

Il n’y avait pas à reculer, il fallait lire.

— Qu’est cela, grande Chon ? un billet doux ? dit le roi.

— Oh ! mon Dieu, oui, sire.

— Et de qui ?

— Du pauvre vicomte.

— Bien sûr ?