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XXXIV

VOLTAIRE ET ROUSSEAU


Comme nous l’avons dit, la chambre à coucher de Luciennes était une merveille de construction et d’aménagement.

Située à l’orient, elle était fermée si hermétiquement par les volets dorés et les rideaux de satin que le jour n’y pénétrait jamais avant d’avoir, comme un courtisan, obtenu ses petites et grandes entrées.

L’été, des ventilateurs invisibles y secouaient un air tamisé, pareil à celui qu’aurait pu produire un millier d’éventails.

Il était dix heures lorsque le roi sortit de la chambre bleue.

Cette fois, les équipages du roi attendaient depuis neuf heures dans la grande cour.

Zamore, les bras croisés, donnait ou faisait semblant de donner des ordres.

Le roi mit le nez à la fenêtre et vit tous ces apprêts de départ.

— Qu’est-ce à dire, comtesse ? demanda-t-il ; ne déjeunons-nous pas ? on dirait que vous m’allez renvoyer à jeun.

— À Dieu ne plaise, sire ! répondit la comtesse ; mais j’ai cru que Votre Majesté avait rendez-vous à Marly avec M. de Sartines.

— Pardieu ! fit le roi, il me semble qu’on pourrait bien faire dire à Sartines de me venir trouver ici, c’est si près.

— Votre Majesté me fera l’honneur de croire, dit la comtesse en souriant, que ce n’est pas à elle que la première idée en est venue.