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— Sire, M. le gouverneur a fait fermer les écuries de peur qu’elles ne donnassent refuge à quelque malfaiteur.

— Mes piqueurs, où sont-ils ?

— Aux communs, sire.

— Que font-ils ?

— Ils dorment.

— Comment ! ils dorment ?

— Par ordre.

— Par ordre de qui ?

— Par ordre du gouverneur.

— Mais les portes ? dit le roi.

— Quelles portes, sire ?

— Les portes du château.

— Elles sont fermées.

— Très bien. Mais on peut s’en procurer les clés.

— Sire, les clés sont à la ceinture du gouverneur.

— Voilà un château bien tenu, dit le roi. Peste ! quel ordre !

Le valet de pied sortit, voyant que le roi ne lui adressait pas de nouvelles questions.

La comtesse, étendue sur un fauteuil, mordillait une belle rose près de laquelle ses lèvres semblaient de corail.

— Voyons, sire, lui dit-elle avec ce sourire languissant qui n’appartenait qu’à elle, j’ai pitié de Votre Majesté, prenez mon bras, et mettons-nous en quête. Chon, éclaire le chemin.

Chon sortit la première, faisant l’avant-garde, et prête à signaler les périls s’il s’en présentait.

Au détour du premier corridor, un parfum qui eût éveillé l’appétit du gourmet le plus délicat, commença de chatouiller les narines du roi.

— Ah ! ah ! dit-il en s’arrêtant, qu’est-ce donc que cette odeur, comtesse ?

— Dame ! sire, c’est celle du souper. Je croyais que le roi me faisait l’honneur de souper à Luciennes, et je m’étais arrangée en conséquence.

Louis XV respira deux ou trois fois le parfum gastronomique, tout en réfléchissant, à part lui, que son estomac lui