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— La bonté du roi pour moi est inépuisable, madame, dit la favorite.

— Oh ! s’écria du Barry, quelle tuile sur la tête de ces Saluces que je ne puis pas souffrir.

— Si j’offrais mes services à madame, reprit la vieille plaideuse se décidant de plus en plus, entraînée qu’elle était à la fois par son intérêt et par la comédie que l’on jouait avec elle, je ne considérerais pas le gain de mon procès ; car enfin ce procès, que tout le monde regarde comme perdu aujourd’hui, sera difficilement gagné demain.

— Ah ! si le roi le voulait pourtant, répondit le vicomte, se hâtant de combattre cette hésitation nouvelle.

— Eh bien ! madame a raison, vicomte, dit la favorite, et je suis de son avis, moi.

— Vous dites ? fit le vicomte ouvrant des yeux énormes.

— Je dis qu’il serait honorable pour une femme du nom de madame, que le procès marchât comme il doit marcher. Seulement, nul ne peut entraver la volonté du roi, ni l’arrêter dans sa munificence. Et si le roi, ne voulant pas, surtout dans la situation où il est avec ses parlements, si le roi, ne voulant pas changer le cours de la justice, offrait à madame un dédommagement ?

— Honorable, se hâta de dire le vicomte. Oh ! oui, petite sœur, je suis de votre avis.

— Hélas ! fit péniblement la plaideuse, comment dédommager de la perte d’un procès qui enlève deux cent mille livres ?

— Mais d’abord, dit madame du Barry, par un don royal de cent mille livres, par exemple ?

Les deux associés regardèrent avidement leur victime.

— J’ai un fils, dit-elle.

— Tant mieux, c’est un serviteur de plus pour l’État, un nouveau dévouement acquis au roi.

— On ferait donc quelque chose pour mon fils, madame ; vous le croyez ?

— J’en réponds, moi, dit Jean, et le moins qu’il puisse espérer, c’est une lieutenance dans les gendarmes.